La campagne des élections européennes a duré de longs mois. Et pourtant, au soir du 9 juin, les politiciens et les éditorialistes n’ont pas pris de vacances. En effet, devant l‘incontestable percée du Rassemblement national, Emmanuel Macron a préféré dissoudre l’Assemblée nationale. Remettant en jeu le mandat des 577 députés. Avec seulement quelques jours pour organiser la campagne des législatives anticipées. Cette décision, hautement controversée, n’a pas vraiment plus à Édouard Philippe :
« Le président de la République a tué la majorité présidentielle. Il l’a dissoute. C’est pas moi qui suis parti, c’est pas des frondeurs qui l’auraient énervé. Il a décidé de la dissoudre. », clamait le président du parti politique Horizons en juin dernier.
Depuis, moins de 3 semaines ont passé. Entre les deux tours, il a fallu s’arranger, pour éviter la disparition du bloc central (Ensemble, Modem, Horizons…) dans l’hémicycle. Et éviter la majorité absolue pour le RN. Mission réussie, avec l’appui non négligeable des candidats du Nouveau Front Populaire. Dès l’annonce des résultats, Édouard Philippe a immédiatement rappelé qu’il n’envisageait pas une coalition avec la gauche. Mais voilà que son historique avec Marine Le Pen refait surface…
Édouard Philippe en négociation avec le RN ?
Depuis sa création, mais plus encore, sur les quinze dernières années, ce parti classé à l’extrême-droite par le Conseil d’État se pose comme l’ennemi du système. Un récit politico-médiatique qui marche. Puisque parmi les Français, beaucoup voient le RN comme leur planche de salut. La seule planche qui ne soit pas pourrie à leurs yeux d’ailleurs. En surface, la classe politique fait toujours mine de se pincer le nez face à Marine Le Pen. Mais en coulisses, le dialogue existe. C’est Libération qui a lancé un pavé dans la mare. En titrant sur les rendez-vous organisés avec elle, chez Thierry Solère (député LREM de 2017 à 2022). Et en désignant Édouard Philippe. Tel une sorte d’agent double, prêt à pactiser avec le RN, loin des plateaux télé.
Quelque part, il est heureux pour Jordan Bardella que cette affaire ne soit pas sortie plus tôt. Car elle aurait considérablement égratigné l’image du parti « anti-système ». Devant la polémique qui ne cesse d’enfler depuis mardi soir, Édouard Philippe a très vite répondu. Sur le plateau de BFMTV, le maire du Havre a d’abord relativisé.
« Oui c’est vrai, nous avons dîné, parce qu’on se connaît peu et nous avons constaté à l’occasion du dîner, qui était très cordial, que nous avions des désaccords très profonds sur de très nombreux sujets. »
Poussé par Gilles Bouleau, il a fini par justifier cette rencontre informelle avec Marine Le Pen, en évoquant son tempérament curieux :
« J’aime bien rencontrer des gens. »
De son côté, Thierry Solère précise que ce rendez-vous a eu lieu avant la dissolution de l’Assemblée nationale (le 9 juin 2024). Et que, contrairement aux faits énoncés par Libération, Édouard Philippe n’a pu échanger qu’une fois avec l’ancienne présidente du Rassemblement national. De son côté, le député Julien Odoul (RN) ne voit rien de scandaleux dans ce dîner. Qui prouve selon lui l’ouverture d’esprit de sa formation politique.
« Nous ne sommes pas sectaires. », a déclaré le parlementaire fraîchement réélu sur BFMTV.
Relation informelle, dialogues dans l’intérêt dans la nation ou réunion stratégique ? Nous le saurons un jour.
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