L’Abbé Pierre : un rapport dévoilé par Emmaüs International évoque plusieurs cas d’agressions sexuelles

Né en 1912 et décédé en 2007, l'Abbé Pierre avait mis toute son énergie dans la lutte contre la misère. Mais plusieurs femmes révèlent que l'homme d'église avait une face bien plus sombre.

Coup de terre dans le milieu associatif et caritatif. Dans un monde marqué par les inégalités et la pauvreté, la figure de l’Abbé Pierre restait porteuse d’espoir. Même plus de 15 ans après son décès, le fondateur du Mouvement Emmaüs vit encore à travers le travail des équipes. Ou du moins ses idées, ses valeurs et ses principes. Et pourtant, s’il a beaucoup fait pour venir en aide aux exclus, l’homme a aussi commis des faits bien moins réjouissants.

Le journal La Croix vient tout juste de médiatiser l’affaire. Et on peut saluer la transparence d’Emmaüs International. Loin de vouloir noyer le poisson, l’association a elle-même lancé une enquête interne, après avoir été alertée, en 2023 par une victime présumée de l’Abbé Pierre. Elle raconte que le fondateur du mouvement l’aurait agressé à plusieurs reprises alors qu’elle était encore mineure. Proche de sa famille, il aurait touché sa poitrine. Les faits remonteraient aux années 1970 et 1980. Elle révèle aussi que l’Abbé Pierre lui aurait demandé pardon en 2003, quelque temps avant sa mort. Alarmé par ce témoignage, Emmaüs international a sollicité l’aide du groupe Egae, spécialisé dans la lutte contre les discriminations…

« Le Mouvement Emmaüs rend publics des faits qui peuvent s’apparenter à des agressions sexuelles ou du harcèlement sexuel, commis par l’abbé Pierre, entre la fin des années 1970 et 2005. Ces faits ont concerné des salariées, des volontaires et bénévoles de certaines de nos organisations membres, ou des jeunes femmes dans l’entourage personnel de l’abbé Pierre. Le Mouvement a mandaté un cabinet expert de la prévention des violences, le groupe Egaé, pour mener un travail d’écoute et d’analyse. Ce travail a permis de recueillir les témoignages de sept femmes. L’une d’entre elles était mineure au moment des premiers faits. D’après les informations recueillies, plusieurs autres femmes ont subi des faits comparables, mais n’ont pas pu être entendues. », commence la fondation Abbé Pierre, dans un communiqué mis en ligne ce mercredi

L’Abbé Pierre : des victimes crues et entendues

Dans les grandes entreprises, les partis politiques et même les familles, le silence et la peur du scandale étouffent encore parfois celles et ceux qui veulent dénoncer des abus. Emmaüs n’a pas opté pour cette approche. Après le signalement reçu en 2023, l’association a creusé le sujet. Afin d’identifier d’autres éventuelles victimes. Au total, 7 se sont manifestées. L’Abbé Pierre est accusé d’agressions sexuelles sur ces femmes. Des actes commis, le plus souvent à huis clos. Il aurait même envoyé des courriers déplacés à certaines d’entre elles. Jusqu’ici, on ne parle que de faits commis entre 1970 et 2005.

Néanmoins, Emmaüs International ne compte pas s’arrêter là. En effet, l’association fait savoir que tous les témoignages seront entendus.

« Un dispositif de recueil de témoignages et d’accompagnement, strictement confidentiel, s’adressant aux personnes ayant été victime ou témoin de comportements inacceptables de la part de l’abbé Pierre, a été mis en place. »

La structure prend la situation en main. N’hésitant pas à évoquer les parts d’ombre de l’Abbé Pierre.

« Ces révélations bouleversent nos structures, au sein desquelles la figure de l’abbé Pierre occupe une place majeure. Chacun d’entre nous connaît son histoire et son message. Ces agissements changent profondément le regard que nous portons sur un homme connu avant tout pour son combat contre la pauvreté, la misère et l’exclusion. »

Sans pour autant renoncer aux actions mises en place auprès des plus démunis.

« À l’heure où l’urgence sociale et la nécessité de défendre les personnes les plus précaires se font ressentir avec une particulière acuité, les missions exercées au quotidien par l’ensemble des salariés, des compagnes, compagnons et bénévoles du Mouvement Emmaüs, demeurent indispensables. La solidarité, l’entraide et l’accueil inconditionnel des plus démunis constituent notre raison d’être. Le Mouvement Emmaüs combat toutes formes de violences et entend dénoncer les actes inacceptables commis par une personne qui a joué un grand rôle dans son histoire. Nous le devons aux victimes. Nous le devons aussi à toutes celles et ceux qui, depuis plus de 70 ans, portent au quotidien les actions du Mouvement. Nous partageons leur peine et leur colère, mais également leur détermination à continuer d’œuvrer, chaque jour, pour construire un monde plus juste et plus solidaire. »

Une réaction exemplaire, qui rappelle celle de certains comités, engagés contre les violences au sein de l’église. Et qui s’avère plutôt rassurante pour les équipes, mais aussi les publics accompagnés par Emmaüs et la fondation Abbé Pierre.

« Plusieurs personnes étaient informées que l’abbé Pierre avait un comportement inadapté envers les femmes, sans forcément prendre conscience de la réalité des violences commises. », note également Egae dans son rapport. 

Une ligne destinée au recueil des témoignages vient d’entrer en service, au 01.89.96.01.53. Les victimes peuvent aussi écrire à emmaus@groupe-egae.fr.

« Le choc a été immense pour nous. La priorité est de faire preuve d’une totale transparence et faire tout ce qui est en notre capacité pour aider et soutenir les personnes qui ont eu le courage de témoigner. Je pense aussi aux personnes que nous aidons et accompagnons au quotidien, qui subissent la pauvreté, le mal-logement. Nous allons vivre une période mouvementée, mais je veux leur dire que nous allons poursuivre sans relâche notre combat auprès d’elles. », conclut Marie-Hélène Le Nédic, qui préside la Fondation Abbé Pierre.

Sources : la-croix.com

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